http://www.sudouest.fr/2011/10/20/toujo ... 9-4720.phpToujours la sécheresse Sur le bassin du Né, la situation est très inquiétante. Les pêcheurs craignent la catastrophe.
Jean-Michel Rigollaud, président des pêcheurs, debout dans le lit de la rivière, montre la
hauteur normale de l'eau, au niveau des racines. En arrière-plan, subsiste seulement une
petite fosse. M. B.
«Au premier octobre, le bilan sur le bassin du Né est catastrophique : 167 kilomètres sur 374
sont en assec », se désole Jean-Michel Rigollaud, président de l'Association agréée pour la
pêche et la protection du milieu aquatique (AAPPMA) Le Pêcheur Barbezilien. Le président
tente toutefois de se consoler : « Cet état des lieux nous permet au moins de construire une
passe à anguilles et de faire des travaux qui ne sont possibles que pendant l'étiage… » Mais
les pêcheurs étaient loin d'en demander autant.
Et le président de voir rouge à nouveau face aux incivilités des riverains : « Certains viennent
avec leur tracteur défoncer le lit de la rivière et saccager les berges pour récupérer du gravier
ou du sable, d'autres récupèrent le poisson prisonnier dans des fosses… Quand je vois ça,
alors oui, je suis en colère. »
Laurent Paulhac est technicien rivière pour le compte du Syndicat intercommunal
d'aménagement hydraulique (SIAH) du bassin du Né. Il assure un suivi du secteur qui s'étire de
Châtignac au Sud, à Merpins au Nord. Il établit, tous les quinze jours, une cartographie pour
examiner la situation. La nouvelle carte sera éditée ce mardi. Sur celle du 1er octobre, la
situation est déjà catastrophique : seuls deux petits bras du Né entre Voulgézac et Blanzac et
à Saint-Médard, coulent encore, soit en tout et pour tout 10 kilomètres. Pour le reste des
rivières, y compris le Né, l'écoulement est classé comme faible sur 136 kilomètres. Il est en
rupture sur 60 kilomètres et totalement en assec sur 167 kilomètres.
Les assecs avaient déjà dépassé les 100 kilomètres à la mi-juillet. En juin, 50 kilomètres s'écoulaient pour descendre à 14 kilomètres en juillet. Avec l'arrivée de
la période de pluie, l'écoulement a pu être restitué sur 30 kilomètres en août, pour rechuter
aussitôt.
Pas assez de temps « On passe un temps fou à examiner les sites pour pouvoir anticiper et organiser des pêches
électriques de sauvetage. Mais nous n'avons que très peu de temps pour intervenir. On fait ce
qu'on peut. Parfois, comme ici, à Pontabrac, près du pont Napoléon, il y a de grandes fosses,
mais la profondeur nous empêche d'intervenir à pied. Il a fallu patienter pour sauver ce qui
pouvait l'être. Et en attendant, d'autres se sont servis.
Qu'ont-ils fait des poissons ? Lorsque j'ai surpris des personnes, elles m'ont répondu qu'elles
les vendaient. Comment peut-on imaginer la consommation de poissons qui se retrouvent
dans de l'eau noirâtre et en perte d'oxygène ? Les gens sont vraiment inconscients. »
Pas assez de temps non plus, car les bénévoles ne sont pas forcément disponibles au bon
moment. « Il faut dix bonhommes à chaque fois. Même les femmes sont présentes.
Personnellement, remarque Jean-Michel Rigollaud, je travaille pour une société de cognac, je
ne peux pas me libérer aussi facilement. »
Jusqu'à présent, le président estime que 450-500 kilogrammes de poissons ont été sauvés sur
le bassin du Né : des brochets, anguilles, carpes, tanches, goujons, ablettes, brèmes, et
vairons. Le président décide des lieux sur lesquels il faut intervenir avec l'aide de la Fédération
départementale de la pêche qui vient avec le matériel. « On vérifie que les résurgences
donnent toujours pour garantir l'oxygénation des poissons une fois transposés. »
« On arrive à la limite » « Aujourd'hui on arrive à la limite, se désespère celui qui se bat pour cette faune. On risque de
rencontrer de nouvelles difficultés par rapport à la densité déplacée. Si la sécheresse
continue, on va dans le mur. Quand le poisson commence à mourir, les efforts sont vains. Il
est trop tard. Dans certains endroits, on a sauvé seulement des anguilles, parce qu'elles ont
une meilleure capacité à survivre dans la vase. » Mais à en croire le site Internet de Météo
France, il se pourrait que la pluie n'arrive que vers la mi-novembre.
Pour ce qui est de l'agriculture, le sujet est sensible. Le pêcheur comprend, mais ne cautionne
pas. Certes, les agriculteurs ont eu le droit d'irriguer quand il y avait de l'eau. Et aujourd'hui,
ils ont fait leur récolte. « Ne peut-on se poser les bonnes questions ? Va-t-on, une fois pour
toutes, décider de pratiquer une autre agriculture ? Qu'en est-il de l'eau potable ? C'est bien
de pouvoir alimenter le réseau en prenant l'eau sur un autre si besoin. Mais jusqu'à quand ? Y
a-t-on pensé ? »